Réhabilitation des infrastructures urbaines: que faut-il faire ?


 

Par J.-C. Labruguière, ing., M.ing.
Collaboration spéciale

 

La tendance naturelle, est de penser qu'il vaut mieux créer du neuf plutôt que de réhabiliter l'existant. Lorsqu'il, s'agit de ponts, de canaux, de tunnels, de métropolitains, l'on pense à réhabiliter plutôt qu'a créer, à moins qu'il y ait saturation des ouvrages existants. Ces mêmes questions devraient être posées lorsqu'il s'agit de canalisations souterraines ou de conduites en surfaces.

L'analyse, de ces problèmes par cette nouvelle approche, permet souvent de découvrir qu'il existe une autre solution, le plus souvent moins dispendieuse.

Les infrastructures urbaines constituent des entités intégrées qui forment un système. On distingue les infrastructures de type réseaux (services souterrains, rues, routes, etc) et celles de type ponctuel (ouvrages d'art, ponts, tunnels). Les infrastructures représentent le talon d'Achille pour l'atteinte d'objectifs économiques et sociaux communs.

Aujourd'hui, les travaux publics et le génie urbain essayent d'intégrer la notion d'interdépendance entre les systèmes municipaux et le milieu urbain.

Actuellement, les infrastructures urbaines ont atteint leur durée de vie économique, plus particulièrement celles construites après la deuxième guerre mondiale. Il est important de souligner le fait que le vieillissement des ouvrages ne suit pas un taux constant de détérioration. Ainsi, nous nous retrouvons devant la problématique d'évaluer les coûts de conservation du système par rapport aux coûts de remplacement.

En pratique, la somme des coûts de conservation est de loin inférieure à ceux de remplacement. Afin de chiffrer l'état du système il est essentiel de se poser les questions suivantes : quel est l'état réel du système? ; quels sont les risques de défaillance, sont-ils mineurs ou majeurs? ; quel est l'état structural des composantes?

 

Entretien et exploitation des infrastructures urbaines
L'exploitation consiste à assurer avec fiabilité et qualité le service rattaché à une infrastructure donnée. L'entretien se définit selon trois manières échelonnées dans le temps. L'entretien régulier et d'urgences qui sont des activités budgétisées et l'entretien préventif (réhabilitation) qui est seulement budgétisé par projet (ponctuel dans le temps). Il faut se rappeler que l'entretien représente l'activité essentielle du système. De ce fait, la priorité des interventions d'entretiens réguliers, d'urgences et préventifs sont directement liés aux critères de performances du système.

 

Stratégie d'intervention
Il est possible de distinguer trois niveaux d'interventions :

1. Intuitive : il s'agit d'une intervention réactive basée sur des allocations budgétaires et essentiellement centrées sur les éléments les plus détériorés.

2. Basée sur l'état présent : ce mode d'intervention requiert des inspections selon des critères décisionnels pour identifier les éléments jugés critiques. L'objectif de ce type d'intervention est de minimiser les nuisances.

3. Basée sur l'état futur : il s'agit d'un système de gestion pour effectuer le maintient de la qualité de service et la conservation du patrimoine. Ce mode de gestion permet la prise en compte des risques de défaillance suite à la prévision de l'état futur selon des modèles stochastiques et déterministes.

 

Critères décisionnels :
On dénombre généralement quatre types de critères :

1. Économiques : coût de réparation ou de remplacement ; dommage de la défaillance.

2. Sociaux : nuisances aux usagers ; manque à gagner.

3. Qualité de service : performance de l'infrastructure ; état structural.

4. Fiabilité : c'est un critère d'intégration de plusieurs variables du système.

 

Stratégie d'intervention basée sur l'état futur
Cette approche de gestion commence par la connaissance du milieu et de l'état du système, ainsi qu'une connaissance des méthodes de conception. À la fin de cette étape les gestionnaires auront en main un inventaire des éléments du système, un historique des défaillances et des interventions, un constat des besoins de réhabilitation en terme de niveau de service.

De cette base de donnée, il sera possible de choisir les objectifs de l'entretien préventif en fonction d'un niveau de service demandé. De plus, il sera possible d'évaluer l'état présent et attribuer un indicateur du niveau de performance du système et un indice d'usure.

Afin de déterminer l'état futur selon des dates cibles il est opportun et essentiel de connaître les courbes de durée de vie des ouvrages considérés.

En plus des étapes précédemment citées, il faut établir des scénarios d'intervention par la constitution d'un répertoire des méthodes d'intervention et selon l'allocation monétaire par classes d'éléments de l'infrastructure et degré de détérioration.

Pour que cette stratégie soit pertinente dans le temps, il est très important d'effectuer une mise à jour des données lorsqu'un élément est réhabilité et évaluer l'efficacité de l'intervention.

Finalement, tous les moyens doivent être pris pour faire un suivi de l'état des réhabilitations selon un calendrier prédé-terminé et documenter les inspections.

En résumé, il est utile de suivre l'évolution de l'infrastructure, car elle permet :

Aux élus de : justifier les budgets requis; évaluer l'impact de divers budget; évaluer l'effet de diverses politiques; évaluer l'effet de divers travaux; estimer les coûts de préservation.

Aux administrateurs : d'établir un programme objectif des priorités; de dresser un bilan de l'état actuel sous forme tabulaire et graphique; de quantifier les budgets requis; d'évaluer les coûts supplémentaires des reports; d'estimer les coûts et bénéfices du système de gestion.

Aux ingénieurs : disposer d'une base de données et de procédures claires pour l'acquisition; disposer de procédures de validation; dresser des modèles de prévision et optimiser les interventions; procédures pour caractériser les matériaux; identifier les causes de détérioration; rationaliser les campagnes d'essai; réaliser des études économiques; relier les actions aux performances; calculer les coûts aux usagers; intégrer toutes les infrastructures.

 

Conclusion
Compte tenu de la complexité physique et technique des réseaux et de son fonction-nement et de la présence de contraintes conflictuelles de différentes natures, il est nécessaire de développer une méthodologie globale de programmation des interventions. Pour apprécier l'état et le fonctionnement des RAU pour les différents scénarios de réhabilitation, des fonctions de performance structurale, hydraulique, environnementale, de coûts sociaux et de maintenance doivent être définis. A chacune des méthodes potentielles de réhabilita-tion corres-pond un coût de réalisation, une opportunité d'application et des nouvelles valeurs des fonctions de performance.

La solution du problème consiste à suggérer au décideur, pour un horizon de planification prédéfini, l'ordre chronologique des interventions de réhabilitation et les méthodes à utiliser pour maximiser les fonctions objectives de performance, minimiser les coûts sociaux et de maintenan-ce tout en respectant les budgets alloués.


© InfraStructures - Tous droits réservés - All rights reserved