À Rouyn-Noranda, un programme de décontamination de site réussi


Par Marcel Tremblay

Travaux Publics Canada affirme que l'aéroport de Rouyn-Noranda est le parfait exemple de la réussite d'un programme de décontamination de site. Les travaux de décontamination des eaux souterraines, entrepris à l'automne 2001 et complétés à l'été 2002 par la firme TechnoRem sont basés sur le procédé de l'oxydation chimique. En juillet 2002, les concentrations en hydrocarbures pétroliers et en composés organiques volatils ont connu des réductions moyennes de 90% et 86%, respectivement.

Rappelons qu'à l'hiver 1993-1994 avait lieu à l'aéroport de Rouyn-Noranda un déversement accidentel d'hydrocarbures pétroliers C10-C50 (diesel no2) et de composés organiques volatils (BTEX) d'un volume de 2500 litres. Ce produit, devenu contaminant, endommagea les terres sur une superficie de près de 3500 m2 en dessous et à proximité de la caserne de pompier et du garage d'entretien de Transports Canada. À ce moment, les études d'impact effectuées permettaient d'identifier une matière qui contaminait l'eau souterraine sur une superficie de 5000 m2. Cette dernière présentait des concentrations supérieures aux normes et règlements en vigueur pour une eau de consommation du Ministère de l'environnement du Québec.

L'aéroport est situé sur le sol québécois. Transports Canada, par sa qualité de gestionnaire et de responsable de la santé et sécurité des personnes et des biens, doit se conformer à la réglementation en vigueur dans la province. Selon la Loi sur la qualité de l'environnement et le Règlement sur les matières dangereuses, le responsable d'un déversement accidentel doit le signaler au ministère de l'Environnement et de la Faune, MEF. De plus, il doit récupérer les contaminants et restaurer le milieu à son état d'avant l'événement.

La responsable du projet chez Transports Canada, Adriana Peisajovich, ingénieure-chimiste, mentionne "les travaux qui se sont échelonnés à partir de 1993 jusqu'en 2001 ne permettaient de faire qu'un suivi annuel de l'eau par une atténuation naturelle du site. On n'y ajoutait que des nutriments tels du phosphate. La technologie du moment ne permettait que de travailler par excavation ou pompage d'un sol que l'on considérait silteux et peu perméable".

Transports Canada demande donc à Travaux Publics Canada de procéder à un appel d'offres pour la décontamination de l'eau souterraine en juin 2001.

En octobre 2001, les hydrocarbures pétroliers en phase dissoute atteignaient 72 000 microgramme/litre (µg/l) et les BTEX totaux atteignaient 299 µg/l.

À l'aéroport, on a établi une zone où se trouve une portion concentrée du contaminant. En utilisant une foreuse pour le roc, le béton et les surfaces meubles telles de la terre, du gravier, de l'argile ou du sable, on obtient en tout temps un échantillon du sol. Cette foreuse permet l'installation de crépines et de puits d'injection et d'autres pour l'extraction et l'observation de la nappe d'eau. Les systèmes mis en place comprennent aussi de longs tuyaux flexibles reliés à ces puits.

Après avoir percé le roc ou le sol meuble dans la zone ciblée, on y introduit un long tuyau par lequel passe la solution choisie. Le puits obtenu est d'environ six pouces de largeur. De la surface jusqu'à la nappe phréatique, on se retrouve dans un espace non-saturé où réside la phase résiduelle de la matière indésirable.

Pour l'oxydation des hydrocarbures pétroliers, la firme qui a remporté l'appel d'offres, TechnoRem, utilise le peroxyde d'hydrogène. Cet oxydant et les solutions catalytiques (tel le fer), et acides (tel le sulfurique), sont injectés sous pression, de 30 à 800 KiloPascal (KPa) à partir de puits d'injection spécialement installés.

La libération d'oxydants chimiques, notamment le peroxyde d'hydrogène et l'ozone, à l'intérieur du milieu contaminé permet de détruire le contaminant en les convertissant en composés inoffensifs retrouvés dans la nature.

La firme TechnoRem Inc. a été fondée en 1996. Les deux fondateurs, spécialisés en hydrogéologie, sont issus du milieu universitaire de la recherche. Elle a établi sa réputation en développant des outils informatiques de gestion scientifique, notamment la modélisation numérique pour le traitement et la protection des eaux souterraines.

Appelée fréquemment à travailler en sous-traitance avec d'autres entreprises de plus grande envergure, TechnoRem se montre fière de sa renommée. Comme l'affirme son directeur général, Jean-Marc Lauzon : "À coup sûr, notre entreprise se situe à l'avant-garde de l'efficacité de traitement des eaux souterraines. Notre force, c'est la recherche et développement. Nous ne sommes que 20 employés mais nous pouvons dire que chacun des mandats que nous accomplissons nous les faisons jusqu'au bout. Nous visons la perfection ni plus ni moins".

De concert avec Transports Canada, Travaux Publics Canada a établi des normes précises que doivent rencontrer toutes les firmes environnementales assujetties aux travaux de restauration de l'eau souterraine et des sols.

Étant responsable de la restauration de la qualité de l'eau selon les normes établies au devis de l'appel d'offres et du MEF, TechnoRem avait à déterminer le niveau initial de contamination par des échantillonnages et des analyses. Par la suite, une fois par semaine, elle effectuait d'autres analyses. Les paramètres, tels les hydrocarbures, BTEX, pH, humidité, température et autres, ont été adaptés à sa technologie employée.

En ajustant constamment les dosages, les concentrations en produits pétroliers sont passées, par exemple, de 45 000 µg/l à 2100 µg/l au puits C-9, de 28 000 µg/l à moins de 100 µg/l au puits PZ-6, de 72 000 µg/l à 300 µg/l au puits PZ-26.

En juillet dernier, Transports Canada affirmait être grandement satisfait des résultats obtenus. Par contre, comme rien ne doit être laissé au hasard, ces résultats auront été l'objet d'un contrôle ponctuel dans quelques puits d'observation au mois d'août. Les résultats devront être confirmés par un expert indépendant avant que la firme ne remette son rapport final attendu pour le début décembre 2002 et que le dossier soit enfin fermé.

L'utilisation croissante de l'oxydation chimique s'explique par sa capacité de dégrader une grande variété d'hydrocarbures. Le traitement est rapide, quelques mois à peine pour l'aéroport de Rouyn-Noranda et, en plus du traitement local des zones contaminées et des sous-produits de réaction inoffensifs, son coût est très raisonnable.

Ce procédé compte aujourd'hui parmi les approches innovatrices dans la restauration des sites contaminés par les hydrocarbures. Plusieurs procédés brevetés de ce traitement sont maintenant offerts par de nombreuses firmes spécialisées en environnement au Québec, au Canada et aux États-Unis.

Il ne reste qu'à l'appliquer aux quelque 400 sites montréalais contaminés par les hydrocarbures. Globalement, il y aurait plus 3279 sites répertoriés sur le territoire québécois contenant ces matières toxiques et plus de 1100 terrains gérés par le gouvernement fédéral.


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