Le dessin industriel... un survol
Récemment, je discutais avec un homme de métier qui me parlait du dessin industriel comme étant le plan nécessaire à la fabrication de produits ou de machines. Pour lui, le dessin industriel fait référence aux blue-prints, aux plans techniques ou encore, aux dessins AutoCADs. À mon tour, je mentionnais, par exemple, que les manches de fourchettes et de cuillères peuvent faire l'objet d'un dessin industriel. Je faisais plutôt référence à l'ornementation qu'on retrouve sur divers articles manufacturés. Ceci dit, ce n'est pas parce que nous venions d'écoles différentes que nous n'avons pas réussi à nous comprendre. Bref, pour l'ingénieur le dessin industriel signifie une chose et pour le juriste, c'est autre chose. Au plan juridique, le dessin industriel se retrouve plus particulièrement dans le domaine de la propriété intellectuelle (brevets, marques de commerce, droit d'auteur et secrets commerciaux). En effet, le dessin industriel, tel que défini par la Loi sur les dessins industriels, c'est : "les caractéristiques ou combinaison de caractéristiques visuelles d'un objet fini, en ce qui touche la configuration, le motif ou les éléments décoratifs." Le dessin industriel protège donc la forme d'un objet, son aspect esthétique ou ornemental. Le dessin industriel protège ce que l'on voit. Au sens de cette loi, l'objet fini inclut tout objet réalisé à la main, à l'aide d'un outil, ou fabriqué par une machine. De plus, la forme ou le motif à protéger doit être original et ne doit pas avoir été divulgué au public plus d'un an (1) avant la demande d'enregistrement. Un dessin original est un dessin qui est nouveau, qui n'existait pas auparavant pour l'objet en question, qui n'est pas similaire à d'autres. Quelques exemples de produits (leur forme ou leurs éléments décoratifs) ayant fait l'objet de dessins industriels sont : les meubles, les ustensiles, la vaisselle, les vêtements, les bijoux, les jouets, les jeux de société, les souliers, les bateaux (Il est à se demander pourquoi les manufacturiers de voitures n'enregistrent pas de dessins industriels pour la forme des voitures ils y auraient droit si le dessin est original). Par contre, la Loi sur les dessins industriels ne protège pas les caractéristiques d'un objet qui ont pour seul but une fonction utilitaire (par exemple : les dents d'une fourchette). La Loi ne protège pas non plus les méthodes, principes de réalisation ou procédés de fabrication qui relèvent du domaine des brevets. D'ailleurs, il faut mentionner que le manufacturier qui enregistre un dessin industriel sur la forme d'un objet ou sur son apparence esthétique peut également enregistrer un brevet pour une partie fonctionnelle ou technique du même objet. En ce qui concerne les dessins industriels, les droits exclusifs de propriété s'acquièrent uniquement par l'enregistrement. Donc, pour obtenir cette protection, le propriétaire d'un dessin industriel doit nécessairement déposer une demande d'enregistrement de dessin industriel auprès du Bureau du commissaire aux brevets à Ottawa. La demande d'enregistrement doit être accompagnée, entre autres, d'une photographie ou esquisse du dessin, d'une description du dessin et d'une déclaration à l'effet que nul autre personne ne fait usage du dessin, et que le demandeur est propriétaire de celui-ci. Compte tenu de la complexité relative des règles spécifiques liées aux dessins industriels, la rédaction et le dépôt d'une demande d'enregistrement de dessin industriel devraient être laissées aux soins de spécialistes, tels les agents de brevets. Au Canada, l'enregistrement d'un dessin industriel confère à son propriétaire un monopole de dix (10) ans à compter de la date d'enregistrement du dessin. L'enregistrement confère au propriétaire les droits exclusifs de reproduire, d'exposer et de vendre l'article incorporant le dessin. Par conséquent, les droits octroyés par l'enregistrement d'un dessin industriel empêchent les tiers de reproduire le dessin sans l'accord de son propriétaire. Cette protection accordée en vertu de la Loi sur les dessins industriel est territoriale. Donc, le dessin industriel est valide uniquement dans le ou les pays dans lesquels le propriétaire a bel et bien obtenu son enregistrement de dessin. Par ailleurs, le propriétaire d'un dessin enregistré doit marquer ses articles incorporant son dessin industriel par le sigle de la lettre D encerclée et suivie du nom du propriétaire. En cas de copiage par un tiers, le propriétaire du dessin peut demander à la Cour d'émettre une injonction empêchant ce tiers de continuer ses activités illégales. De plus, si le propriétaire du dessin a effectivement marqué ses articles (s'il a indiqué que les objets sont protégés par un dessin industriel), il pourra demander à la Cour des dommages monétaires additionnels. Au Canada, une demande de dessin industriel coûte au minimum 1500,00 $ et le processus du dépôt à l'enregistrement peut prendre de 12 à 24 mois. Il est vrai que l'application de la Loi sur les dessins industriel n'est pas évidente en ce qui concerne les machineries lourdes et l'équipement industriel (dans la mesure où les facteurs esthétiques et ornementaux sont de moindre importance). Il est cependant important de connaître l'existence de cette loi. Car (en plus des brevets et marques de commerce) pour ceux et celles qui ont en tête de lancer un nouveau produit ayant des caractéristiques visuelles originales, cette Loi sur les dessins industriels peut offrir au propriétaire une plus vaste protection de sa propriété intellectuelle. |
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