Chevrolet SSR - Le Hot Rod des chantiers

 

Par Jacques Duval

La division Chevrolet est reconnue pour ses véhicules aux lignes sages et conservatrices. En effet, outre la légendaire Corvette, la gamme populiste de GM est composée de modèles &laqno;beaux, bons et pas chers» aux traits génériques. Toutefois il y a trois ans, presque jour pour jour, Chevrolet prenait tout le monde par surprise en annonçant que le prototype SSR dévoilé au Salon de Détroit en 2000 allait être fabriqué en grande série. Si les premiers modèles sont arrivés au compte-gouttes en 2003, les modèles 2004 sont plus nombreux dans les salles de montre des concessionnaires.

Quand on connaît la philosophie de Chevrolet, il est surprenant que les dirigeants aient donné le feu vert à la construction d'un véhicule aussi audacieux. En effet, la marque au nud papillon a la réputation de présenter des prototypes fort intéressant sans pour autant donner suite aux rêves de ses ingénieurs.

Camionnette ou roadster?
Il est difficile de cataloguer le SSR. S'agit-il d'une camionnette ou d'un roadster? Certes, on serait tenté de l'inclure dans la catégorie des camionnettes à cause de ses formes et son plateau de chargement style &laqno;pick-up». Toutefois, son allure sportive et son toit rigide entièrement escamotable laissent croire qu'il pourrait également courtiser les amateurs de roadsters. Avec de telles caractéristiques, on peut imaginer que ce Chevrolet s'avère être le meilleur des deux mondes. Erreur! Si vous croyez que le SSR allie la tenue de route et l'agrément de conduite d'une voiture sport et la capacité utilitaire d'une camionnette, vous serez déçus.

Plus lourd q'un Silverado
Le SSR est propulsé par un V8 Vortec de 5,3 litres. Les 300 chevaux galopent à peine assez fort pour décoiffer le peu de cheveux qu'il me reste sur le crâne! Si les reprises sont énergiques grâce au bon étagement de la boîte automatique à 4 rapports, le 0-100 km/h est plutôt lent avec un temps de 7,6 secondes. En effet, le SSR est handicapé par son poids de 2159 kg. Il s'avère plus lourd qu'une camionnette à cabine simple, deux roues motrices et boîte courte Chevrolet Silverado (1881 kg) et comparable à un Ford F-150 (2158 kg). Pour de meilleures performances, les motoristes auraient dû lui boulonner le moteur de la Corvette ou le 6 litres de 345 chevaux de la Silverado SS. Au freinage, même si les quatre freins à disque avec antiblocage manquent de progressivité, ils font honneur à la bonne réputation des produits GM en immobilisant complètement le SSR sur moins de 40 mètres. Ce qui est court pour une camionnette de deux tonnes!

Dans les virages, le SSR colle au bitume quand celui-ci est lisse comme un billard grâce à ses gros pneus Eagle RS-A spécialement développés par Goodyear. De taille 295/40R20 à l'arrière et de 255/45R19 à l'avant, ces pneumatiques contribuent également à améliorer l'apparence de cette camionnette. En effet, des semelles de 16 à 18 pouces auraient l'air complètement perdues dans les puits de roues d'une carrosserie aussi massive. Si la suspension est indépendante à l'avant, la suspension arrière à essieu rigide est typique d'une camionnette et les imperfections de la route peuvent affecter la trajectoire du véhicule. Par ailleurs, notre véhicule d'essai paraissait solide et les bruits étaient plutôt absents quoique la caisse vibrait à la moindre ondulation de la chaussée. Par ailleurs, on peut se demander si le SSR est apte à affronter les hivers québécois avec ses pneumatiques surdimensionnés et son mode de propulsion à deux roues motrices?

Remorquage et chargement
Il est vrai que le SSR est dans une classe à part mais il ne faudrait pas s'imaginer qu'il représente le véhicule par excellence des entrepreneurs en construction au pays. En effet, la vocation utilitaire de cette "camionnette génétiquement modifiée" dispose d'une boîte de chargement dont le volume se limite à 671 litres. Ce qui le situe à mi-chemin entre le coffre d'une voiture sport et le plateau d'une camionnette sport à boîte courte.

Avec sa capacité de remorquage de 1588 kg, le SSR surclasse évidemment toutes les voitures sport. Par contre, le Chevrolet TrailBlazer, avec lequel il partage une plate-forme commune peut remorquer environ le double, que ce soit avec le L6 (2721 kg) ou le V8 (3220 kg).

Un habitacle des années 50
Au même titre que les New Beetle, PT Cruiser, et Thunderbird, le SSR adopte un style rétro qui ne fera jamais l'unanimité. Mais comme les goûts ne sont pas à discuter, on vous laisse le soin d'en juger. Du côté de l'habitacle, le SSR est fidèle aux formes typées de sa carrosserie et flirte avec l'époque des camionnettes Chevrolet des années 1947 à 1953. Pour nous rappeler l'époque des &laqno;Hot Rod», les stylistes ont reproduit des garnitures intérieures assorties à la couleur de la carrosserie. Toutefois, par rapport au prototype présenté à Détroit, le SSR délaisse la banquette pleine largeur du bon vieux temps pour des sièges baquets bien rembourrés. Pour un effet rétro absolu, les commandes du système audio auraient dû s'inspirer des anciennes radios des années 50. En effet, les boutons sont les mêmes que l'on retrouve dans plusieurs modèles GM aujourd'hui. Heureusement, la nuit venue, l'éclairage tamisé des cadrans nous réconforte avec ces belles années d'après-guerre. Malgré tout, le SSR ne tombe pas dans le &laqno;kitsch» et les moulures décoratives en aluminium apportent une touche contemporaine.

Quant à la position de conduite, il faut avouer que l'on se sent un peu à l'étroit quand le toit est en place. Mais le tout est rapidement dissipé une fois le toit rétracté. Ajustable seulement en hauteur, une colonne de direction télescopique n'aurait pas été du luxe dans un véhicule de ce prix.

Un toit unique
Non je n'allais pas oublier la pièce maîtresse du SSR : son toit rigide entièrement rétractable. Comparativement aux toits rigides escamotables des modèles roadster et cabriolet de la concurrence, le toit du SSR ne se replie pas à l'horizontale sous le couvercle amovible du coffre. En effet, celui-ci se sépare en trois sections pour s'empiler à la verticale entre l'habitacle et la boîte de chargement. Ce qui n'affecte pas son espace cargo.

Un jouet, point.
Il y a un mot qui résume parfaitement ce qu'est véritablement le Chevrolet SSR : un jouet. Et un jouet de riches par dessus le marché. Ce SSR, c'est un peu la Plymouth Prowler des années 2000 de mon cher ami Michel Barrette. Michel a eu son kick et l'a revendue... sans faire de profit parce qu'il a attendu trop tard. Beaucoup d'autres ont fait comme lui et Chrysler a dû stopper la production. La Prowler avait fait son temps et il en sera de même dans quelques années avec le Chevrolet SSR. Un engin original, je n'en doute pas mais un engin parfaitement inutile aussi.

Mais si vous vous voulez ébahir vos amis (oubliez les amies, elles trouvent ça grotesque), ce roadster-pick-up fait le travail. Surtout, en jaune. Ne vous inquiétez pas pour les contraventions car le moteur fait plus de bruit qu'autre chose.

 Fiche Technique Chevrolet SSR
 Type: véhicule hors catégorie
 Moteur: V8 - 5,7 litres - 16 soupapes
 Puissance: 300 ch @ 5200 tr/min - 331 lb pi @ 4000 tr/min
 Transmission: automatique à 4 rapports
 Direction: à crémaillère, assistée
 Suspension: av indépendante / arr essieu rigide
 Freins: av disques / arr disques ABS
 Accélérations 0-100 km/h: 7,8 secondes
 Vitesse maximale: 195 km/h
 
  Chevrolet SSR

Dodge Ram SRT10

Ford SVT Lightning

 Empattement: 295 cm 306 cm 304 cm
 Longueur: 486 cm 537 cm 528 cm
 Largeur: 200 cm 203 cm 201 cm
 Hauteur: 163 cm 189 cm 180 cm
 Poids: 2159 kg 2338 kg 2120 kg
 Puissance: 300 hp 500 hp 380 hp
 Pneus: 255/45R19 / 295/40R20 305/40R22 295/45R18
 Réservoir: 94 litres 100 litres 97 litres


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