Jeep Liberty : tradition et modernisme


Par Jacques Duval

 

Le Jeep Cherokee aura eu la vie dure. Il devait être éliminé après l'arrivée du Grand Cherokee en 1992, il a poursuivi sa carrière en raison d'une très forte demande de la part des acheteurs. Chez Jeep, on a continué la production en se disant que le phénomène allait s'estomper rapidement. Pourtant, année après années, les chiffres de ventes étaient stables alors que les acheteurs plébiscitaient les dimensions raisonnables de ce tout-terrain, son agilité de chèvre de montagne en conduite hors-route et une mécanique robuste à défaut d'être sophistiquée. Malgré une cure de rajeunissement en 1997 qui a permis de rafraîchir la silhouette, remplacer le tableau de bord et moderniser quelque peu la mécanique, le Cherokee arrivait de plus en plus difficilement à se défendre contre une horde de nouveaux modèles plus modernes, plus élégants et plus sophistiqués à tous les points de vue.

Le nouveau Liberty qui le remplace doit posséder le modernisme nécessaire pour être de son époque, tous en respectant la tradition de la marque Jeep. Après tout, c'est Jeep qui a inventé cette catégorie. Parlant d'héritage et d'équité de marque, il est malheureux à mon avis que la direction de Daimler-Chrysler ait abandonné l'identification de Cherokee au dépend de Liberty. Avec ce nouveau nom, il faut presque repartir à zéro auprès du public.

Une longue tradition
Chez Jeep, les dirigeants sont fiers de l'héritage de cette marque. D'ailleurs, la publicité du nouveau Liberty fait état de la contribution de la première Jeep à la libération du continent européen au cours du second conflit mondial. Cet héritage est également visuel et technique. Sur le plan technique, ce nouveau modèle possède toujours le même châssis "Uniframe" consistant en une carrosserie monocoque offrant la robustesse d'un châssis autonome avec des rails et des longerons de renforts intégrés dans la plate-forme. L'utilisation d'acier de haute qualité, l'implantation d'éléments de renforts en des points critiques et une nouvelle géométrie de la plate-forme permettent d'obtenir une caisse dont la résistance à la torsion et à la flexion est améliorée de 43% et de 58% par rapport au Grand Cherokee.

Les stylistes se devaient également de respecter la tradition visuelle des modèles antérieurs. En intégrant plusieurs des éléments stylistiques du prototype Dakar dévoilé en 1997, ils ont retenu la silhouette passablement équarrie propre à Jeep tout en conservant également la célèbre calandre à sept rayons verticaux qui assure une identification automatique. Les phares circulaires ainsi que la forme du capot sont aussi des emprunts au passé de même que les passages de roues en relief. Par contre, les rondeurs des angles de la carrosserie sont inspirés par un autre prototype : le Jeepster dévoilé en 1998. Enfin, les cadrans circulaires du tableau de bord sont directement semblables à de ceux de la première Jeep fabriquée par Willys-Overland en 1941.
Plusieurs éléments mécaniques respectent la tradition. Les deux systèmes de rouage intégral sont les mêmes que précédemment. Le système Command-Trac est à temps partiel et il est de série sur les modèles Sport et Limited. C'est le choix de bien des puristes qui utilisent fréquemment leur utilitaire sport en forêt. Le Selec-Trac offert en option est une intégrale très populaire auprès des personnes ne quittent presque jamais la route avec leur tout-terrain.


Modernisme
Si les certaines données techniques et esthétiques du Cherokee ont été reprises sur le Liberty, ce nouveau modèle ne craint pas de rompre avec la tradition de la marque. Historiquement, tous les produits Jeep avaient une suspension à essieu rigide aussi bien à l'avant qu'à l'arrière afin de pouvoir compter sur des éléments très robustes en conduite tout-terrain. Cette fois, la suspension avant est indépendante tandis que l'essieu arrière demeure toujours rigide. Avec des leviers triangulés très robustes, la suspension avant ajoute certainement au niveau de confort.

Si on avait voulu respecter la tradition, la direction aurait été à billes. Pourtant, les ingénieurs ont opté en faveur d'une direction à pignon et crémaillère. Enfin, les groupes propulseurs n'ont aucune filiation avec ceux du Cherokee. Le moteur de série sur le modèle Sport est le même quatre cylindres de 2,4 litres de 150 chevaux qui équipe le PT Cruiser, La boîte manuelle est la seule disponible avec ce moteur. Le Limited est livré avec un V6 de 3,7 litres d'une puissance de 210 chevaux. Il s'agit d'un moteur dérivé du V8 4,7 litres initialement utilisé sur le Grand Cherokee et sur le Durango par la suite. Incidemment, ce V6 est livré de série avec la boîte manuelle tandis que l'automatique à quatre rapports est offerte en option.

Le Cherokee s'était également attiré les critiques avec la présence de son pneu de secours pleine grandeur dans le coffre à bagages. Sur le Liberty, les concepteurs ont remplacé le hayon arrière par une ouverture combinée intégrant une lunette arrière indépendante et une porte inférieure à charnières latérales où est ancré le pneu de rechange.

Surprise
Les quelques trois cents kilomètres conduits lors de la présentation du Liberty en Virginie et l'heure passée derrière le volant à franchir ruisseaux, ponceaux et ornières de toutes sortes m'ont permis de conclure que le Liberty a retenu toutes les caractéristiques de véhicule tout-terrain agile et costaud qui ont fait la réputation de la marque. Mais la bonne nouvelle est que le comportement routier de ce nouveau venu est parmi les plus intéressants de la catégorie.

Mais ce qui distingue le plus le Liberty est sa conduite sur la route. La suspension avant fait des merveilles pour absorber les chocs et assurer une stabilité directionnelle impeccable. De plus, la nouvelle direction à crémaillère n'est pas trop assistée, ce qui nous permet d'avoir un excellent feed-back de la route. Je me demande toutefois si cette direction très précise ne sera pas snobée par les conducteurs américains qui préfèrent généralement quelque chose de moins sensible.

Généralement neutre en virage avec un sous-virage modéré lorsque poussé à la limite, cette Jeep se démarque surtout par son confort. La caisse très rigide a permis aux ingénieurs d'assouplir la suspension, ce qu se traduit par un confort surprenant pour la catégorie. Le moteur V6 grogne quelque peu lorsqu'on écrase l'accélérateur à fond, mais il est fort bien adapté autant par son rendement que sa puissance. La boîte automatique ne suscite aucun commentaire négatif. Par contre, puisque les versions à moteur V6 et boîte manuelle seront offerts un peu plus tard, je n'ai pas été en mesure d'essayer cette combinaison qui est pourtant de série sur le Limited.

Enfin, l'habitacle est confortable et moderne. Il faut également souligner que l'accès aux places arrière est très facile puisque les portières arrière sont de grandes dimensions. Enfin, tous les sièges sont confortables.

Par contre, la version avec le moteur quatre cylindres et la boîte manuelle, déçoit alors que les reprises sont molles. Il faut d'ailleurs constamment jouer du levier de vitesses pour que quelque chose se produise. De plus, le passage des rapports est saccadé.

Conclusion
Malgré tout, le Liberty possède toutes les caractéristiques nécessaires en plus d'une suspension confortable et un comportement routier intéressant pour s'établir facilement parmi les meneurs de la catégorie. D'autant plus que les prix sont très, très compétitifs.

 Fiche Technique Jeep Liberty Limited
 Type: utilitaire sport compact, traction intégrale
 Moteur: V6 - 3,7 litres - 12 soupapes
 Puissance: 210 ch @ 5200 tr/min - 225 lb pi @ 4000 tr/min
 Transmission: automatique à 4 rapports
 Direction: à crémaillère - assistée
 Suspension:  av indépendante / arr essieu rigide
 Freins:  av disques / arr tambours - ABS optionnel
 Accélérations 0-100 km/h:  9,5 secondes
 Vitesse maximale:  185 km/h
 

 

 

 

  Jep Liberty

Ford Escape

Toyota RAV4

 Empattement: 255 cm 261 cm 249 cm
 Longueur: 443 cm 439 cm 419 cm
 Largeur: 182 cm 178 cm 173 cm
 Hauteur: 180 cm 178 cm 168 cm
 Poids: 1867 kg 1571 kg 1307 kg
 Puissance: 210 hp 200 hp 148 hp
 Pneus: 215/75R16 235/70R16 215/70R16
 Réservoir: 70 litres 62 litres 56 litres

 

60 ans d'histoire...

 

La marque Jeep tire ses origines d'un véhicule tout-terrain réalisé pour le compte de l'armée américaine. En effet, le 23 juillet 1941, Willys-Overland obtenait le contrat pour la production du premier Jeep. La version civile, le CJ-2A, est apparue en 1945.

La marque de commerce &laqno;Jeep» a été enregistrée le 30 juin 1950, par Willys-Overland afin de capitaliser l'équité de la marque rendue célèbre dans le monde entier lors de la seconde guerre mondiale.

En 1962, les Jeep de la série J ont fait leurs débuts. Offerts en versions pickup et familiale, ils étaient les premiers à jumeler le rouage à quatre roues motrices, un moteur V8 et une transmission automatique, devenant en quelque sorte le premier véhicule utilitaire sport.

En 1984, la série XJ (le petit Cherokee) était en quelque sorte le premier véhicule utilitaire sport compact.

En 1992, le Jeep Grand Cherokee, qui avait été conçu à l'origine pour remplacer le XJ, fut plutôt destiné à une clientèle plus affluente. Il a été entièrement redessiné en 1999, alors que le Cherokee poursuivait son chemin en demeurant un des 4x4 les plus abordables sur le marché.

Le Liberty, quant à lui, est un véhicule moderne qui fait honneur à ses racines sans toutefois exiger de ses propriétaires les mêmes compromis au niveau du confort que ses prédécesseurs. (JFV)


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