Un béton vert recyclant 2 fois plus de cendres de charbon et conçu pour durer

Michael Quin,
Institut royal de technologie de Melbourne (RMIT University)
Collaboration Speciale


 


Une nouvelle modélisation révèle que le béton à faible teneur en carbone mis au point par l’Institut royal de technologie de Melbourne (RMIT University), de Melbourne en Australie, peut recycler 2 fois plus de cendres de charbon que les normes actuelles, réduire de moitié la quantité de ciment nécessaire et offrir des performances exceptionnelles dans le temps.

Plus de 1,2 milliard t de cendres de charbon ont été produites par les centrales électriques au charbon en 2022. En Australie, ces cendres représentent près d’un cinquième de l’ensemble des déchets et resteront abondantes pendant des décennies, même si nous passons aux énergies renouvelables.

Parallèlement, la production de ciment représente 8% des émissions mondiales de carbone et la demande de béton – dont le ciment est un ingrédient clé – augmente rapidement.

Pour relever ces deux défis, les ingénieurs du RMIT se sont associés à la centrale électrique Loy Yang d’AGL et à l’Ash Development Association of Australia pour remplacer 80% du ciment contenu dans le béton par des cendres volantes de charbon.

Chamila Gunasekara, chef de projet au RMIT, considère qu’il s’agit d’une avancée significative, car les bétons à faible teneur en carbone existants ne contiennent généralement pas plus de 40% de ciment remplacé par des cendres volantes.

«Notre ajout de nano-additifs pour modifier la chimie du béton permet d’ajouter plus de cendres volantes sans compromettre les performances techniques», déclarait-il.
Des études approfondies en laboratoire ont montré que l’approche de l’équipe est également capable de récolter et de réutiliser des «cendres de bassin» de moindre qualité et sous-utilisées – provenant des bassins de stockage des boues de charbon dans les centrales électriques – avec un minimum de prétraitement.

De grands prototypes de poutres en béton ont été créés en utilisant à la fois des cendres volantes et des cendres d’étang, et il a été démontré qu’ils répondaient aux normes australiennes en matière de performances techniques et d’exigences environnementales.

«Il est passionnant de constater que les résultats préliminaires montrent des performances similaires avec des cendres d’étang de moindre qualité, ce qui pourrait ouvrir une toute nouvelle ressource largement sous-utilisée pour le remplacement du ciment», ajoutait monsieur Gunasekara. «Comparées aux cendres volantes, les cendres d’étang sont sous-exploitées dans la construction en raison de leurs caractéristiques différentes. Des centaines de mégatonnes de déchets de cendres sont stockées dans des barrages en Australie, et bien plus encore dans le monde entier. Ces bassins de cendres risquent de devenir un danger pour l’environnement, et la possibilité de réutiliser ces cendres dans des matériaux de construction à grande échelle serait un gain considérable.»

Un programme pilote de modélisation informatique développé par le RMIT en partenariat avec le Dr Yogarajah Elakneswaran de l’université d’Hokkaido, au Japon, a été utilisé pour prévoir les performances de ces nouveaux mélanges de béton en fonction du temps.

Selon le Dr Yuguo Yu, expert en mécanique informatique virtuelle au RMIT, l’un des défis de longue date dans ce domaine est de comprendre comment les matériaux nouvellement développés résisteront à l’épreuve du temps.

«Nous avons maintenant créé un modèle basé sur la physique pour prédire comment le béton à faible teneur en carbone se comportera dans le temps, ce qui nous offre des possibilités de rétroconception et d’optimisation des mélanges à partir d’observations numériques», expliquait monsieur Yu.

Cette approche pionnière – récemment dévoilée dans la prestigieuse revue Cement and Concrete Research – révèle comment les différents ingrédients du nouveau béton à faible teneur en carbone interagissent au fil du temps.

«Nous sommes en mesure de voir, par exemple, comment les nano-additifs à prise rapide présents dans le mélange agissent comme un booster de performance pendant les premières phases de la prise, compensant les grandes quantités de cendres volantes et de cendres de bassin à prise plus lente présentes dans nos mélanges», expliquait Camila Gunasekara. «L’inclusion de nano-additifs ultra-fins améliore considérablement le matériau en augmentant sa densité et sa compacité.»

Cette modélisation, largement applicable à divers matériaux, marque une étape cruciale vers la simulation numérique dans la conception et la construction d’infrastructures.
En tirant parti de cette technologie, l’équipe vise à inspirer confiance aux conseils municipaux et aux communautés pour l’adoption de nouveaux bétons à faible teneur en carbone pour diverses applications.

Cette recherche a été rendue possible par le Research Hub for Transformation of Reclaimed Waste Resources to Engineered Materials and Solutions for a Circular Economy (TREMS) de l’Australian Research Council (Conseil australien de la recherche, ARC).

Dirigé par le professeur Sujeeva Setunge du RMIT, le TREMS rassemble des scientifiques, des chercheurs et des experts industriels de haut niveau issus de neuf universités australiennes et de 36 partenaires étatiques, industriels et internationaux afin de minimiser les déchets mis en décharge et de réutiliser les matériaux récupérés pour la construction et la fabrication de pointe.

Études pertinentes
- Unified hydration model for multi-blend fly ash cementitious systems of wide-range replacement rates (https://doi.org/10.1016/j.cemconres.2024.107487) publié dans Cement and Concrete Research (DOI : 10.1016/j.cemconres.2024.107487).
- Sulphate and acid resistance of HVFA concrete incorporating nano silica (https://doi.org/10.1016/j.conbuildmat.2023.132004) publiée dans Cement and Concrete Research. (https://doi.org/10.1016/j.conbuildmat.2023.132004) publié dans Construction and Building Materials (DOI : 10.1016/j.conbuildmat.2023.132004)
- Long term mechanical performance of nano-engineered high volume fly ash concrete (https://doi.org/10.1016/j.jobe.2021.103168)e’ publiée dans Journal of Building Engineering (DOI : 10.1016/j.jobe.2021.103168).

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